Place des Jacoboobs. Cela commence comme ça avec l’équipe du film d’Adopte Un Veuf, lors de leur venue à Lyon pour présenter cette comédie pétillante. Au delà d’un énième film en coloc, c’est une histoire de famille tendre et réjouissante sur la solidarité et surtout le dialogue intergénérationnel. Rencontre avec François Desagnat, Béréngère Krief et Arnaud Ducret.
Vous avez des souvenirs de coloc étranges ?
BK : Une année avec une copine… On en a discuté beaucoup lors de la préparation du film. Mais finalement une coloc’ c’est aussi une histoire de communauté, avec la famille, avec les amis, en vacances…
FD : C’était important de recueillir des informations dans notre entourage. Lors de la première rencontre avec les comédiens, on en avait parlé : André Dussollier avait évoqué des problèmes de cohabitation en famille notamment…
AD : Moi j’étais en coloc avec 2 mecs dans 30 m2 quand je suis arrivé à Paris. Mon pote avait des champignons… mais on était heureux ! Ma mère était venu et en repartant, elle pleurait dans la voiture ! On n’a jamais regretté. Le premier jour, on était allés fêter ça au Queens et la voisine était venue sonner. Elle nous a détestés.
BK : Nous on était en dessous d’un couple avec des enfants. Le gamin sautait… J’étais montée et elle m’a dit : « moi, je mets pas de tapis ! »
FD : L’idée, c’est de traiter d’un sujet de société, de la difficulté de se loger dans les grandes villes et la possibilité pour les personnes seules qui avaient de la place d’accueillir des gens et de faire une comédie intergénérationnelle.
Comment est né ce projet ?
FD : Au départ, on m’a contacté pour réaliser un autre film en développement chez Nac, qui a produit Adopte Un Veuf. On a commencé à discuter de ce projet et Richard Pezet m’a finalement annoncé « on veut aussi te parler d’autre chose ». Pour l’anecdote, Richard Pezet est le producteur de La Beuze et des 11 Commandements : il compte beaucoup pour moi, car c’est lui qui m’a accompagné quand j’étais un jeune réalisateur désireux de signer son premier long métrage. Il m’a présenté un traitement sur une idée originale de Jérôme Corcos, en mentionnant les noms d’André Dussollier et de Bérengère Krief pour les personnages principaux. Difficile d’avoir un avis négatif sur André ! Travailler avec quelqu’un comme lui est une chance exceptionnelle. Quant à Bérengère, on s’était déjà croisés et j’avais très envie de travailler avec elle. Du coup, je trouvais le casting et cette idée de film incroyablement excitants.
Comment avez-vous eu l’idée de faire appel à Arnaud Ducret dans un total contre-emploi ?
FD : Je connaissais déjà Arnaud car on avait travaillé ensemble. À l’occasion d’une avant-première, je lui ai parlé d’un projet avec André Dussollier et il m’a confié qu’il adorerait tourner avec lui. Le problème c’est que je ne l’imaginais pas du tout en PG, car sur le papier c’est un mec timide et réservé. Arnaud en avait assez de camper les profs de sport et il a plaidé pour que je lui fasse passer un essai. Il a été formidable ! Arnaud Ducret a une grande générosité. Quand on est en répétition, il n’hésite pas à proposer des vannes pour les autres. Il y a d’ailleurs certaines répliques très drôles, qui sont des trouvailles d’Arnaud pendant les répétitions.
AD : On me propose pas mal de trucs maintenant. Des rôles différents.
Bérengère, parle-nous du personnage de Manuela qui vous a séduite dans le scénario ?
BK : Je suis surtout connue pour camper des filles décomplexée et amoureuses issus de l’after-plan cul régulier de Bref. toujours la nana un petit peu légère. Mais j’avais un peu fait le tour de ce type de personnage et du coup, quand on m’a proposé le rôle de Manuela, j’ai eu envie de la défendre ! Elle a un élan de vie incroyable qui, en même temps, comporte une part de risque. J’ai connu quelqu’un comme elle : elle fraudait dans le métro et c’est moi qui me retrouvais à payer l’amende, et elle venait vivre chez moi pendant plusieurs semaines sans savoir quand elle repartirait. Mais c’est grâce à mon spectacle qu’on me propose des choses. Le personnage de Marla dans Bref, c’était une fille amoureuse. C’est vrai qu’ici je retrouve cette liberté d’un personnage OVNI.
Ce que j’aime chez elle, c’est qu’elle rentre chez Hubert sans se poser la question de savoir si elle dérange. Quand on est humoriste, on aime la comédie. Evidemment si on me propose un super rôle dans un autre registre, je ne vais pas dire non à un « tchao pantine 2« .
Manuela est un vrai soleil : pétillante, vive, directe !
BK : Elle est sans détours. J’affectionne particulièrement ces personnages libres et entiers. Quand elle débarque chez Hubert, elle ne s’adapte pas du tout à son environnement. Contrairement à moi qui m’adapte aux ambiances. Je trouve formidable qu’elle arrive avec toute son énergie et qu’elle insuffle ça à tout ce qui l’entoure. Elle est vraiment libre, et d’ailleurs, elle dit tout haut ce qu’elle pense. J’admire son côté solaire.
Comment on fait pour échapper à l’effet Friends ?
FD : Moi quand on m’a proposé le projet, j’y ai vu totalement autre chose qu’une coloc. L’histoire d’un mec qui n’a pas eu d’enfant, et l’histoire d’une fille qui n’a jamais connu son père. Quand je fais rentrer dans la coloc les 2 , ce sont des frères et soeurs qui débarquent. C’est totalement une famille qui se créé. C’est plus profond et intime que des simples histoires de coloc.
Paul-Gérard semble être un type très propre sur lui, quoique un peu coincé… Mais il ne se résume pas qu’à cela… Dans quelle direction avez-vous voulu l’amener ?
AD : J’ai travaillé ma posture et j’ai cherché à être un peu voûté vers l’avant. Je voulais aussi que mon personnage soit un peu gauche dans ses mouvements, car il n’est pas très à l’aise. J’ai souhaité qu’on lise dans son regard un côté enfantin et touchant. Et puis, il a des tics, comme le fait de remettre ses lunettes sur son nez quand il est gêné ; on a trouvé lors des répétitions. Après, j’ai appris le texte, et j’ai enchainé les répliques : quelqu’un en face de moi me disait « c’est drôle ou c’est moins drôle ! » Pour moi, le physique et la gestuelle sont prépondérants dans un rôle. C’est aussi pour cela que j’ai répété avec la coach de José Garcia et cela m’a beaucoup aidé pour arriver sur le film blindé.
FD : Son personnage prend de l’épaisseur, de la confiance en lui. Au début sur le papier, il n’est pas très bon, mais il va s’améliorer. Il y avait une séquence de plaidoirie qu’on a été obligée d’enlever pour des raisons financières dans le scénario. C’est vrai que c’est Marion qu’on voit un peu plus dans sa vie professionnelle. Le film s’est appelé hyper tard Adopte Un Veuf mais tout le monde était enthousiaste alors que je n’étais pas hyper fan, car j’avais travaillé tout au long du film sur les allusions de sa situation. J’aime quand c’est le spectateur qui se construit son histoire… mais le problème c’est que je n’avais pas un meilleur titre ! Le titre de travail était « Logement partagé » mais on savait qu’il fallait le changer.
La fin de la coloc pour la fin du film ?
Une fois que le père a transmis tout ce qu’il pouvait transmettre, forcément il fallait que cela s’arrête. C’est une famille mais tout le monde vit sa vie chacun de son côté.
Synopsis : Lorsque on est veuf depuis peu, il est difficile de s’habituer à sa nouvelle vie… C’est le cas d’Hubert Jacquin, qui passe le plus clair de son temps dans son immense appartement à déprimer devant sa télé. Un beau jour, suite à un quiproquo, sa vie va être bouleversée. Manuela, une jeune et pétillante baroudeuse à la recherche d’un logement s’invite chez lui ! D’abord réticent, Hubert va vite s’habituer à la présence de cette tempête d’énergie, qui parvient même à le convaincre de loger deux autres personnes. Entre les errements de Paul-Gérard que sa femme a quitté et les gardes à l’hôpital de Marion la jeune infirmière un peu coincée, la vie en colocation va réserver à Hubert de nombreuses surprises…
Un film de François Desagnat, avec André Dussollier, Bérengère Krief, Arnaud Ducret, Julia Piaton et Nicolas Marié, en salles le 20 avril 2016.
Séverine Eberhardt.